Comme vous le savez, le projet de Règlement sur l’encadrement d’activités en fonction de leur impact sur l’environnement (REAFIE) a été publié dans la Gazette officielle du 19 février 2020. Cette publication est le fruit d’un long processus ayant débuté cinq ans auparavant.
Le Livre vert et le projet de Loi 102 : les débuts de la modernisation de la LQE
En juin 2015, j’avais salué la publication du Livre vert sur la modernisation de la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE). Comme vous le savez, ce document proposait de moderniser la LQE dans une perspective d’allègement réglementaire.
Entre autres choses, on y prévoyait une accentuation de la modulation du régime d’autorisation environnementale en fonction du risque. Le document proposait entre autres d’introduire un mécanisme de déclaration de conformité, allégé par rapport au certificat d’autorisation, pour les projets à risque environnemental faible.
Le projet de Loi 102, adopté en 2017, est venu modifier la LQE afin de donner effet au Livre vert. Comme pour ce dernier, j’avais salué l’initiative dont l’objectif consistait à alléger et à simplifier le régime d’autorisation environnementale. Déjà, cependant, certaines réserves s’imposaient quant à certains aspects du projet de Loi 102 qui, à mon avis, risquaient d’alourdir le régime d’autorisation environnementale.
Une première tentative ratée de mise en œuvre réglementaire du projet de loi 102
Pour donner plein effet à sa réforme de la LQE, le gouvernement publiait, en février 2018, le projet de Règlement relatif à l’autorisation ministérielle et à la déclaration de conformité (RAMDCME). Ce volumineux projet de règlement était cependant hautement problématique, d’abord en raison de sa grande complexité, son manque de clarté mais également parce qu’il limitait sérieusement les allègements réglementaires auxquels s’attendait l’industrie suivant l’adoption du projet de Loi 102.
En effet, les conditions d’admissibilité à une déclaration de conformité et à une exemption de l’obligation d’obtenir une autorisation environnementale étaient telles que bien peu de projets auraient été admissibles.
Il va sans dire que le RAMDCME a fait l’objet de nombreuses critiques.
Pour ces raisons, deux anciens mandarins de l’État québécois avaient alors été mandatés pour revoir le projet de règlement. Leur conclusion fut sans équivoque : le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques devait retourner à la planche à dessin.
Mise sur pied des tables de cocréation
C’est dans ce contexte que la ministre alors en poste, madame Isabelle Melançon, annonçait, en juillet 2018, la mise sur pied de tables de cocréation sectorielles afin d’assister le ministère de l’Environnement dans son exercice de révision réglementaire. Il va sans dire que ce fut une annonce bien reçue pour ma part. Peu après sa nomination, le Ministre Benoit Charette confirmait sa volonté de donner suite à cette recommandation du gouvernement précédent.
Cela dit, j’étais quelque peu sceptique quant à la sincérité du processus. Or, force est de reconnaître que le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques et son équipe dédiée au chantier réglementaire, ont mené un processus de consultation aussi ouvert que rigoureux.
Une grande variété de participants a pu exprimer son opinion. Chaque commentaire a d’ailleurs été dûment pris en compte par l’équipe dédiée.
L’aboutissement des tables de cocréation : le REAFIE
Après d’intenses mois de consultation et de rédaction, l’équipe dédiée a finalement publié le REAFIE dans la Gazette du Québec du 19 février 2020, soit presque exactement deux ans après la publication du RAMDCME. La publication du REAFIE est d’ailleurs accompagnée de la publication de 4 nouveaux projets règlements et de multiples règlements modificatifs de concordance.
Par rapport au RAMDCME, le REAFIE présente deux améliorations majeures. D’abord, sa structure est grandement simplifiée. Je suis convaincue que pour les initiateurs de projet, travaillant sur le terrain ou en usine, le REAFIE pourra être utilisé relativement facilement pour savoir si une autorisation est requise, ou si le projet est admissible à une déclaration de conformité ou s’il est exempté en raison du fait que le risque en découlant est négligeable.
L’autre amélioration consiste en une révision de certaines conditions d’admissibilité à une déclaration de conformité ou à une exemption. Bien que de nombreuses activités seront toujours soumises à l’obligation d’obtenir une autorisation, je crois que leur nombre a diminué par rapport à ce qui était prévu au RAMDCME
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La fin d’un processus et le début d’un nouveau
Le REAFIE prévoit une entrée en vigueur en deux temps, soit le 31 décembre 2020 pour l’ensemble de ses dispositions, à l’exception de celles portant sur les renseignements à transmettre au soutien d’une demande d’autorisation (la fameuse « recevabilité ») qui sont censées entrer en vigueur le 31 décembre 2021.
C’est donc au début de 2022, soit 7 ans après la publication du Livre vert, que nous aurons finalement un nouveau régime d’autorisation environnementale. Compte tenu du long processus pris pour y arriver, je comprends l’empressement du gouvernement à adopter le REAFIE et à le faire entrer en vigueur.
Il doit bien y avoir une fin à toute bonne chose!
Trop d’empressement pose cependant ses propres problèmes, comme le risque de manquer de temps pour former les employés au sein des entreprises et du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, par rapport aux nouvelles dispositions applicables.
Notons en outre que la crise sanitaire actuelle, liée au COVID-19 (coronavirus), a forcé le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques à ralentir la cadence. Une prolongation de la période de consultation sur le projet de règlement a en effet été annoncée jusqu’au 19 mai 2020.
Par ailleurs, notons que la réforme du régime d’autorisation, qui s’achèvera avec l’adoption finale du REAFIE, ne visait pas à revoir les normes environnementales sectorielles. Il semble cependant qu’un chantier s’ouvrira prochainement à ce sujet.
Espérons que ce dernier ne durera pas un autre 7 ans!
Me Hélène Lauzon, avocate et urbaniste | Me Olivier Dulude |
Présidente-directrice générale |
Directeur adjoint des affaires publiques et législatives |
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