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Réagir aux politiques américaines récentes dans une perspective de développement durable

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Depuis son investiture le 20 janvier 2025, le nouveau président américain a adopté une pléthore de mesures exécutives dans une foule de domaines, y compris en matière environnementale.

À juste titre, les menaces de tarifs douaniers ont particulièrement retenu l’attention en raison de leurs impacts potentiellement dévastateurs sur l’économie canadienne et québécoise. Toutefois, plusieurs autres mesures pourraient également entraîner des conséquences majeures.

Le présent billet explore certaines des principales mesures annoncées par le nouveau président américain, leurs conséquences sur les entreprises et leurs efforts en matière de développement durable au Québec, ainsi que les actions qui peuvent être prises pour y faire face.

Notons que la situation évolue rapidement et que les effets réels des nombreux décrets et autres mesures prises par le nouveau président sont difficiles à anticiper avec précision. Plusieurs de ces actions pourraient d’ailleurs être contestées ou difficiles à mettre œuvre en pratique. Le présent billet est donc réalisé au meilleur de notre compréhension des impacts appréhendés des politiques américaines récentes au moment de sa rédaction.

 

Des actions multiples sur tous les fronts

Certains ont fait le parallèle entre les nombreuses actions présidentielles de janvier et février 2025 et la stratégie militaire de « choc et effroi » (shock and awe) employée notamment lors de la guerre en Irak, laquelle consiste à faire un emploi spectaculaire de la force pour submerger et démoraliser son adversaire.

On doit convenir que la gamme et la portée des actions entreprises par la Maison-Blanche sont tout simplement ahurissantes. Pour n’en nommer que quelques-unes:

 

L’effet cumulatif des politiques américaines réduit la compétitivité des entreprises québécoises

Bien que les tarifs à eux seuls aient le potentiel d’engendrer des effets négatifs majeurs sur l’économie, d’autres facteurs pourraient amplifier la perte de compétitivité des entreprises québécoises par rapport aux entreprises américaines.

Par exemple, la déréglementation, notamment en matière environnementale, facilitera et accélérera la réalisation de projets aux États-Unis. Le territoire américain sera donc davantage attractif pour les investissements.

Par ailleurs, a production accrue d’énergie aux États-Unis pourrait possiblement mener à des prix plus bas au sud de la frontière, alors que les prix de l’électricité pour les industries québécoises risquent d’augmenter avec la proposition d’indexer le tarif L pour l’électricité patrimoniale dans le cadre du projet de loi 69. L’électricité québécoise bon marché demeure l’un des avantages compétitifs majeurs de la province, mais cet avantage risque de s’effriter.

En outre, si elles se réalisaient, les réductions d’impôts promises par le nouveau président américain pourraient également contribuer à attirer les investissements et l’activité économique aux États-Unis, au détriment notamment du Québec.

Mis ensemble, ces facteurs nuisent à la compétitivité des entreprises québécoises par rapport aux entreprises américaines. Les effets se font d’ailleurs déjà sentir, avec des mises à pied attribuées aux menaces tarifaires.

Pour éviter que l’écart ne se creuse, il convient d’éviter d’ajouter de nouvelles contraintes réglementaires, administratives ou financières et de favoriser l’allègement réglementaire et administratif lorsque cela est possible avec peu ou pas d’impact négatif sur la qualité de l’environnement, dans une perspective de non-régression.  

 

Les contre-tarifs canadiens ne doivent pas nuire aux efforts de lutte contre les changements climatiques

En réponse aux menaces tarifaires américaines, le gouvernement fédéral a proposé « des tarifs de 25% sur 30 milliards de dollars d’importations américaines », lesquels sont suspendus pour le moment en attendant de voir si les tarifs américains seront imposés le 4 mars prochain. Cette première liste de produits est conçue pour viser particulièrement des biens de consommation produits dans des États républicains. Elle inclut, par exemple, le jus d’orange et les motocyclettes.

Une seconde liste de contre-tarifs est en cours d’élaboration et viserait cette fois 125 milliards de dollars de produits importés des États-Unis. Cette liste, plus large, devrait faire l’objet de consultations.

Ces contre-tarifs sont certes nécessaires pour faire pression sur les Américains et les inciter à lever leurs propres tarifs. Toutefois, il convient d’éviter que les contre-tarifs canadiens n’aient pour effet indésirable de nuire à l’atteinte des cibles de réduction des émissions de gaz à effet serre. Ainsi, il serait utile d’exempter des contre-tarifs les produits (y compris les intrants) américains importés au Canada et qui sont nécessaires à la décarbonation des entreprises québécoises.

 

Les programmes d’aide aux entreprises doivent tenir compte du développement durable

À l’image des mesures qui ont été prises lors de la pandémie de COVID-19, tant le gouvernement fédéral que le gouvernement du Québec ont signalé leur intention de mettre en place des programmes d’aide temporaires destinés aux entreprises pour faire face aux turbulences économiques à venir, surtout en raison des tarifs douaniers américains. Par exemple :

Ces aides gouvernementales pourraient faire d’une pierre deux coups.

En effet, en plus d’aider les entreprises à traverser la crise tarifaire, ces programmes pourraient être conçus pour encourager particulièrement les projets en matière d’environnement et de développement durable, par exemple en encourageant les investissements dans les technologies propres, l’efficacité énergétique et les produits à plus faible empreinte carbone.

 

Miser sur les délégations du Québec à l’étranger dans une perspective de développement durable

Les entreprises québécoises ont la chance de compter sur un important réseau de délégations du Québec à l’étranger, lesquelles incluent une forte dimension économique à leurs activités.

Avec une présence non seulement aux États-Unis, mais aussi dans plusieurs pays européens, asiatiques, africains et sud-américains, ces délégations sont bien placées pour aider les exportateurs québécois à diversifier leurs marchés.

Par exemple, des produits québécois destinés aux États-Unis qui contribuent à l’économie circulaire ou à la décarbonation pourraient bénéficier des services des délégations du Québec pour diversifier leurs marchés à l’international, on encore pour miser davantage sur les villes et États américains plus proactifs en matière environnementale malgré les politiques fédérales.

Une telle approche permettrait, au surplus, de faire davantage rayonner à l’international l’expertise et le savoir-faire québécois en matière de développement durable.  

 

Les reculs environnementaux américains sont une occasion pour prendre une position de leadership

La situation actuelle ne comprend pas que des risques. Elle recèle également une opportunité de taille : les reculs environnementaux américains placent le Québec et le Canada dans une position favorable pour devenir des leaders en matière de technologies propres et d’énergies renouvelables.

En effet, alors que le financement de l’Inflation Reduction Act (IRA – une loi qui prévoit des investissements massifs dans la lutte contre les changements climatiques) est mis sur pause et que le gouvernement américain suspend les projets d’énergie éolienne, les gouvernements canadien et québécois pourraient à l’inverse accroître leur soutien aux technologies propres, aux énergies renouvelables, ainsi qu’aux produits locaux à plus faible empreinte carbone.

Cela aurait pour effet de positionner le Canada comme un leader nord-américain en la matière, dans un contexte où la transition énergétique mondiale continuera de progresser malgré les politiques américaines récentes. Une telle approche encouragerait les investissements au Québec et au Canada, ce qui pourrait atténuer les effets économiques négatifs des tarifs. À ce sujet, notons qu’Hydro-Québec prévoit accélérer ses investissements pour atteindre les objectifs de son Plan d’action 2035 tout en créant des emplois.

 

Pour une approche pangouvernementale et collaborative

Force est de constater que les actions à poser pour réagir aux politiques américaines récentes requièrent une collaboration importante entre les gouvernements, les entreprises et la société civile. En effet, qu’il soit question d’allégement réglementaire, d’incorporation d’une dimension environnementale aux contre-tarifs canadiens, aux programmes d’aide aux entreprises et à la diplomatie commerciale, ou encore de positionner le Québec et le Canada comme leaders en matière de technologies propres et d’énergies renouvelables, plusieurs acteurs devront être engagés.

Chacun doit mettre son épaule à la roue pour que le Québec et le Canada se sortent de la période d’instabilité politique actuelle en limitant les dégâts pour l’économie tout en progressant sur le plan environnemental.

Pour en savoir davantage sur les impacts des politiques américaines en matière d’environnement, soyez des nôtres le 9 octobre 2025 pour la 2e édition du Congrès du CPEQ!


 

Me Hélène Lauzon Me Olivier Dulude
Présidente-directrice générale    

Directeur adjoint des affaires publiques et législatives

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